Publié le 4 commentaires

Réflexions sur l’orgasme

Aujourd’hui, j’ai envie de te parler de l’orgasme, et de tout ce qu’il m’évoque, de tous les questionnements que j’ai autour de lui, de comment j’ai cheminé sur ce sujet au fil des années… Il y a tellement de choses à dire !
D’ailleurs, exceptionnellement, j’ouvre les commentaires sous mon article, donc si tu souhaites en dire un peu plus sur ton rapport à l’orgasme après m’avoir lue, je te lirai avec beaucoup d’attention !

Primo, l’orgasme, c’est quoi ?

  1. Selon la science
    C’est un cocktail très complexe et subtil de stimulation érotique directe (on excite les parties génitales), de libération/inhibition de différentes hormones (dopamine, prolactine… et baisse de l’hormone du stress) et d’implication très forte du cerveau et des émotions. Les neurosciences permettent aujourd’hui de voir que l’orgasme, s’il peut être mécanique, est aussi très fortement corrélé à l’activité du cerveau. On peut orgasmer sans aucune stimulation physique (je suis sûre que beaucoup d’entre vous ont déjà eu un orgasme pendant le sommeil), ce qui prouve l’importance du cognitif dans le processus.
    C’est ce qui fait qu’il peut être décrit et vécu de manière très différente d’une personne à l’autre, et d’un moment à l’autre, en fonction du contexte, des partenaires, etc…

    Chez les hommes comme chez les femmes, on retrouve des points communs : afflux de sang massif dans le clitoris et dans la verge, spasmes du vagin et spasmes périnéaux, plus ou moins nombreux et rapprochés, et une durée qui peut varier de quelques secondes à quelques minutes. Chez l’homme et chez toute personne dont les organes sont mâles, l’éjaculation et l’orgasme sont deux choses distinctes.
  2. Comment moi je vois les choses
    Pour moi l’orgasme est ce moment où le plaisir est au plus haut, mais surtout, où il va retomber et où je vais m’endormir comme une masse. Pour être honnête, la plupart du temps, j’essaie de ne PAS orgasmer. J’adore tellement tout ce qu’il y a AVANT l’orgasme !!! Oh my god rien que d’y penser ça me donne envie d’aller me faire des auto-câlins sous la couette…

    Mais parfois, j’ai des orgasmes absolument mécaniques, qui arrivent pour ainsi dire “tous seuls”, c’est souvent le cas quand j’orgasme pendant une pénétration et que c’est arrivé un peu rapidement, ou quand je ne prends pas vraiment le temps de me masturber. J’ai un orgasme “cheap”, pas très fort, on ne peut pas dire que c’est un moment d’intense euphorie.

    Donc vraiment, l’orgasme ça peut être comme de boire une gorgée de coca : ça pétille quelques secondes et… c’est tout. J’ai juste envie de boire une autre gorgée, encore et encore, mais le pétillant est de plus en plus atténué et sans intérêt, voire même finit par être écoeurant.

    Il y a aussi l’orgasme utilitaire : un petit orgasme et hop on s’endort beaucoup plus facilement, un petit orgasme et hop, plus de mal de tête, etc. Si tu n’as jamais essayé, le prochain coup, tente une petite paluchade plutôt qu’un paracétamol, tu m’en diras des nouvelles:)

Relation sexuelle et orgasmes

Dans un monde idéal, quand les gens font du sexe ensemble, au bout d’un moment survient l’orgasme des uns et des autres, ou pas, et c’est cool, et tout le monde a pris son pied. Cependant, je suppose que tu l’as remarqué comme moi, nous sommes très loin d’un monde idéal, surtout en ce qui concerne le sexe. Et alors vient s’y mêler tout plein de considérations qui compliquent tout.

Par exemple, il n’y a pas d’égalité hommes-femmes devant l’orgasme. Il suffit de regarder un porno hétéro lambda : ça se termine, quand l’homme termine, et pis c’est tout, et dans le meilleur des cas, la nana a eu un orgasme par pénétration (hum, c’est le cas de seulement 1/3 des femmes apparemment) . Le porno n’est pas la vie, cependant, le porno a cela de commun avec la sexualité du commun des hétéros que très souvent, l’orgasme masculin est le plus important, et le plus récurrent. Il est vu, par tout le monde, hommes comme femmes, comme TRES important, et quasi indispensable à la conclusion d’un rapport sexuel.

Je vais sûrement beaucoup te surprendre (hum, non, je suis trop prévisible) : je trouve ça tout pourri. Et je vais te dire pourquoi je trouve ça tout pourri.

  1. L’orgasme comme objectif
    Si on part dans une relation sexuelle, avec comme objectif de jouir, je mets ma main à couper qu’on va louper tout ce qu’il y a de meilleur dans la relation sexuelle, à savoir, tout le reste.
  2. Groooossse pression
    Sérieux, ça fout la pression à tout le monde !!! Le mec se dit « faut que je jouisse sinon ça va être trop long pour elle », « faut que j’éjacule sinon je suis pas un homme », « pfff je jouis pas elle sait pas y faire», etc.
    Et la meuf de son côté : « s’il jouit pas c’est que je suis pas un bon coup », « punaise il a pas encore joui, j’en peux plus, y en a pour encore combien de temps ? », « et si je simulais pour que ça aille plus vite ? »etc.
  3. Frustration
    Si le mec jouit tout le temps et la meuf jamais, inutile de te dire que ça va créer de la frustration, inévitablement. Pas toujours consciente, pas toujours exprimée, mais de la frustration quand même.

Donc ça, c’est un peu la relation inégalitaire hétéro classique. Mais il y a aussi le renversement de cela, qui n’est pas non plus vraiment une solution, c’est quand dans la relation hétéro, l’homme met l’orgasme de la femme comme objectif à atteindre « quoiqu’il en coûte ». Le féminisme est passé par là, les hommes ont conscience que le plaisir des femmes est important, et donc, ils s’attellent à la tâche, mais sans toujours trop savoir comment faire. En tant que femme, je l’ai déjà vécu bien évidemment, et je vais te dire : c’est très chiant. Ça part d’une bonne intention, mais les bonnes intentions et l’enfer ne sont jamais très éloignés, toi-même tu sais.

Les trois points du dessus, sont valables de la même manière. L’homme se met une grosse pression à faire jouir sa partenaire, et s’il n’y arrive pas, sera frustré. La femme risque de se mettre aussi la pression pour faire plaisir à son homme, meilleur moyen de ne surtout pas avoir d’orgasme. La suite logique c’est qu’elle simule pour faire plaisir et comme ça tout le monde est content (ou pas).

J’ai consulté différentes études trouvables sur le net, et en gros, beaucoup de gens simulent. Les femmes plus que les hommes, mais les hommes aussi.


Ego et orgasme donné à l’autre

En fait, je pense qu’il est très facile, dans la volonté de faire du bien à l’autre, de tomber dans de l’égotisme : donner du plaisir à l’autre, non pour le plaisir de faire plaisir, mais pour renforcer l’estime de soi. Moi-même je lutte contre cela. N’est-ce pas gratifiant, de voir l’autre prendre son pied grâce à ce qu’on lui fait ? N’a t’on pas un sentiment d’accomplissement lorsque nos caresses provoquent un orgasme ? Quoi de plus satisfaisant que de sentir le sperme couler dans ma main, ou de voir mon amant perdre pied tandis que je le chevauche ?

En soi, rien de mal à cela. Mais si on n’y fait pas attention, on risque de perdre de vue le plaisir de l’autre, afin de renforcer notre image de nous-même.

Il m’est souvent arrivé d’avoir le sentiment que mon partenaire, connaissant mes « boutons d’allumage », cherche le chemin le plus facile et le plus rapide pour me faire jouir. C’est parfois assez frustrant. Ou alors, espère me faire jouir en allant droit au but, en mode « si j’y vais vite et fort sur son clito elle va kiffer ». En général, ça échoue. Ou alors j’ai un orgasme, purement mécanique, assez pourri.

Là, tu as tout lu depuis le début et tu te dis : ah ouais, elle est anti-orgasme en fait !
Mmm, eh bien, tu n’aurais pas tout à fait tort, mais je vais quand même détailler pour t’expliquer mon point de vue.

L’orgasme est surcôté

Franchement, je trouve que dans notre société occidentale, actuellement, l’orgasme est devenu surcôté. On y met une telle importance, c’est un peu le PIB (produit intérieur brut pour celles et ceux qui vivent dans une grotte) de la relation sexuelle. Plus y en a, mieux c’est. Eh ba, non, je ne suis pas d’accord.

En fait, l’orgasme, c’est super, vraiment. Mais comparons la relations sexuelle avec, disons, un délicieux repas : entrée, plat, dessert. L’entrée, ce serait tout ce qu’il y a avant la relation sexuelle : imagination, échange de regard, discussions, etc. Le plat serait la relation à proprement parler (caresses, fellation, pénétration, bisous dans le cou, etc, le tout sans ordre ni hiérachie) et le dessert, l’orgasme. Si tu manges une bouché de l’entrée vite fait, que tu engloutis le plat comme si tu n’avais pas mangé depuis 3 mois pour passer directement au dessert, un peu comme un enfant qu’on force à manger ses épinards pour avoir droit au gâteau au chocolat, bah je te le dis très sincèrement, je pense que c’est gâché. Je ne dis pas qu’il faudrait qu’une relation sexuelle dure toujours des heures, mais que goûter chaque étape, n’en rend l’orgasme que meilleur. Et que si on a bien profité de l’entrée et du plat, il est possible qu’on ait plus très faim pour le dessert, ET C’EST PAS GRAVE !

Ou encore, qu’on ait besoin d’un trou normand (nooon promis il n’y a aucune allusion rhooo) entre le plat et le dessert, d’une pause salvatrice parce que le désir est un peu retombé, et puis quand la faim reviendra, hop, petit dessert de derrière les fagots.

Ou encore, le plat est tellement bon qu’on en oublie l’existence du dessert, et puis tiens on relève le nez de son assiette et OH, surprise ! Un gros gâteau au milieu de la table !

Enfin tu vois l’idée ?
J’ai bien peur que l’orgasme soit devenu une sorte d’obligation, après avoir longtemps été tabou pour ce qui concerne celui des femmes, et je ne suis pas sûre que ce soit un progrès.

L’orgasme, c’est spectaculaire, c’est bling-bling, ça brille et ça claque. Et nous sommes dans une société qui vante sans cesse la croissance, les performances. Le monde du travail est subordonné à cette culture du résultat, et cette tendance se diffuse dans tous les recoins de nos vies : productivité jusque dans les loisirs, et le sexe n’y échappe pas.

Pourtant, je suis convaincue, en bonne réfractaire au système, que là n’est pas l’épanouissement de l’être humain. Que la sexualité n’est pas une entreprise du CAC 40, mais qu’elle peut au contraire être un endroit de lâcher-prise, de rencontre intime avec l’autre. Je vis la sexualité comme une ouverture au sacré, une possibilité de connexion profonde et intense avec soi-même et avec un.e partenaire et avec le monde par la même occasion.

Et si on oubliait l’orgasme, pour mieux jouir ?

L’orgasme peut être une expérience vraiment merveilleuse et extraordinaire. Mais il déteste la crispation, la pression, le stress, le chantage, le forcing. L’orgasme s’offre avec encore plus de couleurs et d’intensité quand on s’éloigne de lui pour mieux s’en rapprocher. Il est un peu du genre « fuis-moi je te suis suis-moi je te fuis » l’orgasme, c’est un p’tit blagueur. J’ai remarqué que plus quelqu’un veut retarder son éjaculation et plus elle arrive vite, et plus quelqu’un s’obstine à vouloir jouir et plus l’orgasme s’éloigne.

Le problème, c’est que parfois, on ne vit pas une sexualité épanouie telle qu’on la voudrait, mais on ne sait pas comment ni quoi changer pour améliorer les choses.
Ou encore on aspire à vivre des relations sexuelles moins normées, moins pressurisantes, mais on ne trouve pas de partenaires pour cela, par peur d’être jugé si on ne correspond pas aux attentes tacites.

Plus j’acquiers d’expérience sexuelle, et plus je suis convaincue, que personne ne fait orgasmer personne. Je fais un peu de provocation en disant cela, mais à vrai dire, si je veux avoir un orgasme, je sais comment faire, et je pourrai en avoir un quel que soit mon ou ma partenaire. Et je pense que tout le monde peut arriver à cela, à force de s’explorer soi-même et d’apprendre à communiquer sans honte. D’ailleurs, si tes orgasmes ne sont pas terribles, tu peux m’en parler aussi ! Et s’ils sont extraordinaires, wow, trop chouette, j’adorerais que tu dises en commentaires quelles étaient les circonstances de tes 7ième ciels de folie !

Si ce que je raconte ici te paraît désirable et sensé, et que tu sens que tu as besoin d’expérimenter avec une pro dans un cadre sécurisant, tu peux me contacter pour prendre rendez-vous.

4 réflexions au sujet de « Réflexions sur l’orgasme »

  1. Bonjour. pour ma part je n’ai eu que un orgasme. et j’ai éjaculer des milliers de fois. cela serait bien d’approfondir le sujet de l’orgasme masculin et l éjaculation qui sont deux choses vraiment différent. on peut aussi avoir un orgasme sans éjaculation par le tantrisme par exemple. sujet intéressant.

    1. Oui tout à fait, orgasme et éjaculation sont deux choses différentes, c’est vrai que je ne l’ai pas abordé dans cet article car mon angle d’attaque était plutôt celui de la pression de performance. Aussi, n’ayant pas de pénis moi-même, il m’est difficile de parler d’une expérience que je ne vis pas, même si j’en suis témoin régulièrement : je peux vois régulièrement des hommes éjaculer et je n’ai parfois pas le sentiment que leur orgasme a existé ou a été plaisant, et à l’inverse, j’ai pu être témoin également d’orgasmes sans éjaculation, et cela semble être une expérience différente et très intense, de l’orgasme avec éjaculation. Mais je serais bien en peine d’en parler vraiment.

  2. Mon rapport à l’orgasme est une chose simple et complexe à la fois, soit cela peut venir rapidement soit il faut presser tous les boutons, lever toutes les manettes pour le même résultat; tout est une affaire de circonstances et le chemin pour y arriver a l’avantage d’être riche par sa diversité et des surprises que l’on peut rencontrer.

    Avec le temps, je conçois cela comme un voyage où le meilleur est durant le trajet et non la destination. L’orgasme et l’éjaculation est souvent proche dans l’acte, je pense que c’est le cas pour un grand nombre d’hommes, c’est une source de confusion pour beaucoup de monde, de frustration, merci à l’éducation reçue et les idées prémâchées de la société.

    Anna, ton image d’une relation sexuelle d’un repas est très bonne, avec la relation que j’ai à l’orgasme, je la compléterai par la notion d’appétit : j’attaque un repas selon l’appétit du moment, je savoure les goûts, les saveurs et textures, cela augmente l’appétit quand les épices du plat crée une osmose et généralement je redemande le plat. Le dessert … c’est quand j’ai l’appétence suffisante.

    Les meilleurs orgasmes que j’ai eu ont été en solo, quand il y a aucune pression ressentie comme une fin de journée de travail où je n’ai plus qu’à me reposer. Les sensations données par la fellation, les vêtements, les objets provoquent les premiers spasmes et la sensation d’une montée d’une éjaculation est absente.

    Il y a tant dire sur ce sujet et en discutant avec des amis ou ses partenaires, en plus de faire montrer la température, on en append beaucoup.

    1. Coucou Denis !

      Rajouter le paramètre de l’appétit est une excellente idée !
      Comme toi, ce qui m’intéresse bien plus que la destination, c’est le voyage, la découverte. Je pense d’ailleurs que de se concentrer sur l’instant présent, les sensations immédiates, permet d’éviter la routine dans une relation suivie depuis plusieurs années, mais c’est un autre sujet.

      Tu as raison quand tu dis que pour la plupart des hommes, l’éjaculation et l’orgasme sont concomitants, ou très rapprochés. Faire la distinction entre les deux est importante, car certains hommes n’éjaculent pas/plus (suite à une opération de la prostate par exemple, ou par une pratique spécifique de la sexualité comme le Tao, ou pour d’autres raisons que je détaillerai un jour dans un article sur l’anéjaculation), et pour autant ils peuvent avoir des orgasmes. Et l’inverse est vrai aussi : une éjaculation peut être exempte d’orgasme.

      Quoiqu’il en soit, le principal est d’avoir du plaisir. Quand on essaie de se conformer à un modèle préétabli, les choses se compliquent en général… Parfois on choisit la norme au lieu du plaisir sans le savoir, ou la norme en lieu et place d’une connexion intime avec l’autre.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *